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en demandant d’abord la liberté de tous et les trois jours par semaine, puis en réduisant le nombre des affranchissemens à quatre cents, au profit des chefs ; et ceux-ci promettaient de faire rentrer les autres à leurs travaux, et de remettre neuf cents bons fusils que les colons leur avaient donnés en les organisant contre les hommes de couleur.

Mais les colons refusèrent de nouveau toute concession. Les révoltés demandèrent alors la liberté générale de tous les combattans. Ces négociations se passaient depuis un mois. Le 16 septembre 1792, Rigaud écrivit à Roume la lettre dont nous donnons ici un extrait.


Monsieur le Commissaire national civil,

Étant chargé de pouvoirs de l’assemblée provinciale du Sud, pour aller faire un arrangement avec les nègres insurgés et réfugiés dans les montagnes du Platon, il est de mon devoir de vous instruire où en sont les choses ; si je ne l’ai pas plus tôt fait, monsieur, c’est que je n’avais pas encore l’espoir de terminer avec eux. Mais, après un mois de peines et de risques, je suis enfin parvenu à ramener ces nègres à des principes de paix. On accorde la liberté à sept cents ; je leur délivre des imprimés d’affranchissement au nom de la province du Sud, en vertu des pouvoirs qui m’ont été donnés. Je m’occupe à les organiser en compagnies de cent hommes chacune, pour faire le service et protéger la plaine et les mornes, et se porter partout où besoin sera dans la province pour arrêter les insurrections, les incendies et les brigandages ; une partie sont déjà en activité dans ce service ; les habitans commencent à rentrer chez eux, et j’espère que sous peu ces mêmes habitans seront à même de réparer les pertes considérables qu’ils viennent d’essuyer.

Vous avez vu, monsieur, l’adresse que j’ai faite à la commission nationale civile, sous le couvert de M. de Saint-Léger, où je parlais d’accorder la liberté à une partie de nègres que les habitans blancs avaient armés contre les hommes de couleur, et qui ont profité du moment qu’ils étaient armés pour secouer le joug ; ces nègres, formés en compagnies de gendarmerie, auraient maintenu tout le reste, seul moyen d’empêcher l’insurrection générale. Mais, monsieur, le commis-