Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/12

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menti le plus formel au projet qu’on leur imputait. Polvérel prononça ces paroles :

« Je vous déclare, au nom de mes collègues, sans crainte d’en être désavoué, je vous déclare en mon nom, que si, par impossible, l’assemblée nationale changeait quelque chose à l’état de vos propriétés mobilières, j’abdiquerais sur-le-champ toute mission, et remettrais entre les mains de la nation tous les pouvoirs qu’elle m’a confiés, plutôt que de me rendre complice d’une erreur aussi funeste à la colonie. »

Sonthonax et Ailhaud donnèrent les mêmes assurances sur leurs intentions personnelles. Sonthonax déclara « que jamais l’intention de l’assemblée nationale n’avait été d’abolir l’esclavage, et que si cette assemblée égarée en provoquait l’abolition, ils juraient de s’y opposer de tout leur pouvoir. »

Ces déclarations prouvent que, loin de menacer les colons, les commissaires redoutaient une résistance de leur part.

Dès ce début, Polvérel et Sonthonax laissent voir la différence qui existait dans leur caractère et dans leurs idées : cette différence a été remarquée encore plus dans la suite, et a influé sur leurs actes particuliers. Polvérel promet bien d’abdiquer sa mission, de remettre ses pouvoirs, plutôt que de concourir à une mesure qu’il considérerait comme une erreur de l’assemblée nationale, préjudiciable aux intérêts des colons. Mais Sonthonax va plus loin ; il jure que si cette assemblée tombait dans cet égarement, si elle provoquait l’abolition de l’esclavage, il s’y opposerait de tout son pouvoir. Dans les paroles de Polvérel, on reconnaît un homme consciencieux qui ne voudrait pas contribuer