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avoir le jarret coupé : dans tous les autres cas, les jugemens sont sans appel. Et cependant, l’article 32 du code noir leur accordait toujours ce droit d’appel aux conseils souverains, sans distinction de cas : il voulait qu’ils fussent jugés avec les mêmes formalités que les personnes libres. Loin d’améliorer la situation des esclaves, la proclamation l’empirait.

En rendant compte de cet acte inconcevable, le rapport de Garran dit : « Sans doute, plusieurs des peines énoncées dans la proclamation des commissaires civils sont non-seulement beaucoup trop sévères, mais même véritablement barbares : on y condamne à avoir les oreilles et le jarret coupés l’esclave qui, après une première évasion, écoutera une seconde fois le cri de la nature pour se soustraire à la plus intolérable tyrannie… S’ils n’ont pas cru pouvoir se permettre de supprimer ces horribles mutilations, qu’elles prononçaient (les anciennes lois), en cas de récidive, contre les nègres marrons, ils en ont du moins ôté la peine de mort, qui avait lieu dans le code noir pour la troisième fois. »

Nous trouvons ces excuses fort indulgentes ; car nous avons cité sept cas où la peine de mort est établie dans la proclamation. C’était le résultat du régime odieux de l’esclavage, nous en convenons avec la commission des colonies ; mais nous disons qu’au 5 mai 1793, après les précédens faits et les actes déjà relatés des commissaires civils, ils n’étaient nullement dans l’intention ni de préparer ni de prononcer l’affranchissement général des esclaves.

Pour mieux juger de leurs intentions à cet égard, voyons ce que l’un et l’autre ont dit dans les Débats pour se justifier de cet acte.

Après s’être défendu sur son opinion contenue dans