Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/182

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poir ; il veut parler, mais ses sanglots paraissent étouffer sa voix. Après un moment de recueillement, au grand étonnement de tous ceux qui l’entourent, on l’entend prononcer ces paroles entre-coupées : « J’adore mon fils… Je sais tout ce que sa position et la mienne ont de pénible… Il peut périr… J’en fais le sacrifice à la République… Non, ce n’est point à moi de gâter sa cause… Mon fils a été pris en portant des paroles de paix à des révoltés… Galbaud a été pris les armes à la main contre les délégués de la France… Il n’y a pas parité… Quel que soit le sort de mon fils, je ne consentirai jamais à l’échanger contre un coupable… »

« L’exaltation, continue P. de Lacroix, quand elle est portée à un tel point, se communique comme le fluide électrique. Les hommes de couleur qui entouraient les commissaires furent si émus, qu’ils s’écrièrent tous d’une voix unanime : « Commissaires, prenez au hasard cent d’entre nous, envoyez-les en rade, demandez en retour votre fils, et dites au général Galbaud d’appesantir ensuite sur nous sa colère. Il doit lui être plus doux de verser notre sang, puisque nous seuls l’avons combattu, que de retenir sans profit dans les fers un innocent.

Rien ne put triompher du stoïcisme des commissaires… »


Ils répondirent en effet à Galbaud :

« S’il existait aucune espèce de droit des gens entre un criminel de lèse-nation révolté et les dépositaires de la puissance nationale, vous n’auriez pas même l’avantage de l’avoir observé. Polvérel fils a été pris