Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/184

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Polvérel comme celui d’un père dénaturé. Il ne leur appartenait pas de savoir que les meilleurs pères sont généralement les meilleurs citoyens ; qu’on aime sa patrie comme on aime sa femme et ses enfans, et par cela même qu’on les aime beaucoup ; que ce sentiment, comme tous les autres, s’élève jusqu’à l’héroïsme dans les grandes occasions ; et que peut-être l’espèce d’abdication des sentimens de la nature qu’il inspire momentanément, en est en quelque sorte la meilleure sauvegarde, par le respect que la grandeur du caractère inspire à ceux même qui sont les moins capables de faire de tels sacrifices. »


Les commissaires civils écrivirent le 10 juillet à la convention nationale, en rendant compte des événemens passés au Cap :

Telle est, citoyens représentans, la position désastreuse où Galbaud nous a laissés dans la province du Nord. Sans marine, sans argent, sans ressources pour s’en procurer, n’ayant de subsistances que pour un mois, nous ne désespérons pas encore du salut de la patrie ; nous allons plus loin, nous ne vous demandons ni vaisseaux, ni matelots ; c’est avec les naturels du pays, c’est avec les Africains, que nous sauverons à la France la propriété de Saint-Domingue…

Nous nous attendons, citoyens, à toutes les calomnies, à toutes les absurdités que les négriers de Saint-Domingue vont répandre contre nous ; déjà ils nous accusent de sacrifier à notre ambition l’espèce blanche, de nous faire un parti des hommes de couleur et des esclaves, et d’aspirer à la souveraineté ; à d’aussi impudens mensonges nous n’avons qu’une réponse à faire.

Il est vrai que nous avons toute la confiance des affranchis et que les esclaves nous regardent comme leurs libérateurs ; il est très-vrai que si c’est un crime auprès de la convention d’avoir suivi très-scrupuleusement ses principes, d’avoir constamment protégé les opprimés contre les oppresseurs, nous sommes coupables de cet honorable forfait.

Quoi qu’il en soit, la convention nationale peut compter sur notre