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ne pouvait qu’occasionner une profonde sensation parmi tous les colons, quelle que fut la division des esprits. Si, dès le commencement de la révolution, en 1789, ils se divisèrent en deux grands partis, — celui des grands planteurs qui formèrent l’assemblée générale de Saint-Marc, visant à se soustraire à l’obéissance due à l’assemblée nationale constituante, dont les principes révolutionnaires les effrayaient par leurs conséquences, — et celui des agens du gouvernement royal auxquels se joignirent aussi un certain nombre de planteurs, voulant le maintien de l’ancien régime colonial ; toujours est-il qu’il y avait entre ces deux partis un point de contact, un motif d’alliance ultérieure, dans le respect et l’attachement qu’ils portaient à l’autorité du monarque qui régnait en France. L’un et l’autre ne pouvaient qu’en espérer le maintien du régime colonial, quant à la sujétion des noirs dans l’esclavage et à la soumission des mulâtres et nègres libres au joug du préjugé de la couleur. Ces deux grands partis devaient donc profondément regretter le succès des révolutionnaires en France, qui amena la chute de la royauté. Le parti des petits blancs seul pouvait se réjouir de ce succès, obtenu par les efforts au tiers état dans la mère-patrie. Mais on a pu remarquer que le parti des petits blancs avait été constamment placé sous l’influence des idées de l’assemblée de Saint-Marc, qui s’en était fait un instrument contre les prétentions des hommes de couleur, et contre le désir manifesté par les agens du gouvernement colonial, de maintenir à Saint-Domingue l’ancienne administration. Or, les petits blancs étaient aussi mécontens que les deux autres partis, de la loi du 4 avril qui avait proclamé l’égalité civile et po-