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mesure va ranimer la culture à Saint-Domingue. » Dès le 30 août il lui avait écrit : « Vous sentirez aisément que, dans les circonstances où je me trouve, elle est aussi politique que juste. »

Mais, le 4 septembre, Polvérel défendit la publication et l’exécution de la proclamation du 29 août dans la province de l’Ouest où elle circulait avec la rapidité de l’éclair. C’était déjà un tort de sa part, capable de soulever contre lui tous les ateliers. Il y ajouta, par une mesure inconcevable de la part d’un esprit aussi judicieux, tant il est vrai que l’influence d’un système préconçu peut égarer les plus fortes têtes.

Le 4 septembre, en effet, dérouté par la mesure hardie de son collègue, il rendit une nouvelle proclamation pour soumettre son plan de liberté et celui de Sonthonax, au jugement des noirs esclaves.


Frères et amis, leur dit-il, ma proclamation du 27 août dernier a donné à plus de la moitié d’entre vous la liberté, des terres en propriété, et les droits du citoyen français… Je préparais la liberté de tous… Et en attendant la liberté universelle, qui, dans mon plan, était très-prochaine, je m’occupais de la rédaction d’un règlement qui mettait presque au niveau des hommes libres, la portion d’Africains qui restait encore pour quelque temps soumise à des maîtres.

Six mois de plus, et nous étiez tous libres et tous propriétaires. Des événemens inattendus ont pressé la marche de mon collègue Sonthonax. Il a proclamé la liberté universelle dans le Nord, et lui-même, lorsqu’il l’a prononcée, n’était pas libre.

Il vous a donné la liberté sans propriétés, ou plutôt avec un tiers de propriété sur des terres en friche, sans bâtimens, sans cases, sans moulin et satis aucun moyen de les remettre en valeur ; et moi, j’ai donné, avec la liberté, des terres en production, ou des moyens de régénérer promptement celles qui avaient été dévastées.

Il n’a donné aucun droit de propriété à ceux de vos frères qui sont armés pour la défense de la colonie… Et moi, j’ai donné un droit de co-propriété à ceux qui combattaient pendant que vous culti-