Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/416

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France. Et l’on a osé dire que Candy trahit son drapeau pour 300 mille francs ! S’il y avait à suspecter quequ’un d’une telle infamie, ne serait-ce pas Knappe ? Le mulâtre aura donc toujours tort, alors même qu’il est victime !…

Le fait est que ni Candy, ni Knappe ne trahirent ; ils cédèrent à la force, par une prudence raisonnée. Six mois après cet événement, la prévoyance de Candy fut encore mise en défaut : les blancs espagnols firent impitoyablement massacrer les blancs français, hommes, femmes et enfans, par les noirs de la troupe de Jean François ; et ce fut un prêtre blanc, un prêtre ! qui les excita à commettre ces cruautés. Il se nommait Vasquez.

Nous venons de blâmer Laveaux, en ce qui a trait à ses injustes préventions contre les hommes de couleur. Saisissons l’occasion de louer de nouveau en lui la conduite du militaire. Sous ce rapport, il ne pouvait qu’exciter l’admiration de tous, même de ces perfides mulâtres, comme il les appelle. C’est à l’exemple tracé par l’un d’eux, néanmoins, que Laveaux dut bientôt le retour au giron de la république, de presque toutes les communes qui avaient passé aux Espagnols ou aux Anglais.

En effet, il nous apprend que dans le mois de mars 1794, le perfide Delair, à Jean-Rabel, s’étant fait un parti de mulâtres (sic), lui fît proposer de se rendre à lui : « Nous avions éprouvé trop de trahisons, dit-il, pour qu’il fût prudent de fermer la porte au repentir de ces hommes ardens, irréfléchis et souvent séduits, que le désespoir pouvait rendre terribles et funestes à la république ; je ne rejetai pas la proposition de Delair ; mais je mis à la grâce qu’il demandait, la condition qu’il ferait rendre le camp d’Héré. Il le prit et m’amena vingt-neuf prisonniers. Je lui envoyai sur-le-champ un ren-