saient de même, soit envers la métropole, soit envers lui personnellement ; et pourquoi ce concert ? C’est qu’apparemment son administration laissait beaucoup à désirer. Mais Laveaux était loin de se croire incapable, et surtout despote, comme le sont à peu près tous les chefs militaires, par la nature même de leur profession, et à plus forte raison pendant la guerre.
Le rapporteur Marec jugea autrement que lui, à propos de Rodrigue ; voici ce qu’il dit, après avoir parlé de l’arrestation de ce colonel :
« L’arrestation de Rodrigue, quelque chose qu’il faille penser de cet officier, et l’ordre de sa traduction à bord de la Vénus, étaient une véritable déportation prononcée par le général. Cette mesure avait toute l’apparence, et, il faut le dire, tout le caractère de ce que, dans l’ancien régime, on appelait un coup d’autorité, et de ce que les esprits justes et les amis de la liberté civile ont appelé, dans tous les temps, un acte arbitraire. En frappant Rodrigue, elle avait un inconvénient de plus ; c’était de porter sur un chef accrédité, sur un chef de parti, suivant Laveaux lui-même, et, par conséquent, de provoquer une résistance qui pouvait être étayée par la désobéissance des uns, combattue par l’action des autres, et marquée par l’effusion du sang de tous, et par une nouvelle dévastation, un nouvel incendie de l’infortunée ville du Cap. »
Voilà, certes, une judicieuse appréciation d’un acte arbitraire, qui excita le mécontentement, non-seulement des noirs du 1er régiment commandé par Rodrigue, mais encore des habitans du Cap : aussi Laveaux fut-il contraint de consentir à l’élargissement de cet officier : ce qu’il appela son pardon.