Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 3.djvu/135

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C’est à partir de cet acte, que l’aigreur grossit au Cap contre Laveaux, et contre Perroud qui partageait sa manière devoir. On va en juger par les lignes suivantes que Perroud adressa à la même époque, par la Vénus, au ministre de la marine. Après avoir abondé dans les reproches faits par Laveaux à ceux qu’il accusait de rêver à l’indépendance, Perroud dit :

« Au surplus, comment le Cap serait-il calme et tranquille, comment se pourrait-il que les lois y fussent exécutées et les autorités respectées, quand le moteur de tous les maux de Saint-Domingue, l’auteur de tous les crimes qui s’y sont commis, est dans son sein, Pinchinat,… qui, de concert avec le traître Montbrun, a voulu assassiner le commissaire Sonthonax… Pinchinat, qui, d’accord avec Montbrun, a vendu et livré aux Anglais et aux émigrés la superbe ville du Port-au-Prince… Pinchinat qui, en ce moment même, se flatte encore de tromper la France, et ne craint pas d’y porter sa tête coupable ? » Pinchinat devait partir sur la Vénus.

« Telles sont, dit le rapporteur Marec, les expressions enflammées de l’ordonnateur Perroud sur ce qui concerne Pinchinat ; et à cet égard le gouverneur signale Pinchinat sous le même rapport de complicité avec Montbrun, au crime près d’avoir tenté l’assassinat de Sonthonax ; mais il le peint comme le principal fauteur des troubles actuels de la colonie, et comme dévoré d’une ambition démesurée. Depuis un mois que les nouvelles cabales ont recommencé, dit Laveaux, je les attribue au séjour de Pinchinat au Cap… L’orgueil qui domine Pinchinat le porte à désirer à être dictateur de la colonie. J’ai étudié sa conduite, et avec vérité, je puis dire qu’il perd la colonie. »

Cette colonie fut perdue effectivement pour la France,