compagner Rigaud ; il était aussi au Port-au-Prince, et reçut de T. Louverture l’ordre de se rendre à Jacmel.
C’était la première fois que Rigaud et T. Louverture se voyaient. Les traditions du pays s’accordent à dire que la rencontre de ces deux émules de gloire militaire eut lieu avec des témoignages mutuels d’estime et de bienveillance.
Et pourquoi n’en eût-il pas été ainsi ? Jusque-là, avaient-ils eu quoi que ce soit à démêler entre eux ? Si T. Louverture s’était montré hostile aux anciens libres, aux mulâtres particulièrement, dans l’affaire de Villatte et après ; si, pour parvenir au grade de général de division, au rang de général en chef, il avait sacrifié à toutes les passions de Laveaux et de Sonthonax, Rigaud avait-il tenu compte de ses procédés blâmables ? N’avait-il pas pris l’initiative d’une correspondance intime avec lui par la mission de Pelletier ? Ne parut-il pas d’accord avec lui pour le renvoi de Sonthonax ? Depuis cet événement jusqu’à l’arrivée d’Hédouville, n’avaient-ils pas agi de concert contre les Anglais ? Toutes les lettres que nous avons citées dans ce chapitre ne prouvent-elles pas que Rigaud obéissait à ses ordres, lui témoignait toute la déférence due à un chef supérieur, depuis l’arrivée de l’agent ? En venant au Port-au-Prince, Rigaud y obéissait encore.
Toutefois, il est probable qu’il dut voir avec quelque crainte les tendances de T. Louverture à se placer sous l’influence des colons et des émigrés ; ces tendances étant en rapport avec ses anciens antécédens, elles pouvaient légitimer cette crainte de la part de Rigaud.
Quant à T. Louverture, il ne pouvait avoir à l’égard de Rigaud qu’un sentiment de jalousie, résultant de son mérite militaire et de la rivalité naturelle au métier des armes. S’il avait été jaloux de Villatte, moins brillant que Rigaud