Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/420

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teur passif des ordres du gouverneur, ambitieux du pouvoir, déjà général de brigade, n’était pas aise de trouver l’occasion de se frayer la route d’un poste plus élevé, en dénonçant son supérieur hiérarchique ? Croit-on que les nombreux espions du gouverneur (tout despote ne peut s’en passer) ne lui rendaient pas compte exactement des imprudences de Moïse ?

T. Louverture n’avait besoin que de la moindre dénonciation pour arriver à une résolution contre les jours de son neveu. Il paraît qu’à peu près dans le même temps, des négocians blancs du Cap, voyant la répugnance de Moïse à employer des moyens de rigueur contre les cultivateurs des habitations qu’il tenait à ferme, lui offrirent de les gérer pour son compte, moyennant une somme de 20 mille piastres par mois, dit Pamphile de Lacroix, par an, dit M. Madiou : on peut croire plus exacte l’assertion du premier auteur, parce que Moïse devait avoir au moins autant d’habitations que Dessalines. Le gouverneur ayant appris cette particularité, fut excessivement irrité contre son inspecteur général de culture, disposé à laisser à d’autres, l’exploitation de ces biens : il lui témoigna toute sa colère, en le menaçant.

« Moïse, obsédé de menaces, dit M. Madiou, contrarié dans toutes ses idées et ses entreprises, résolut de s’armer contre le gouverneur dont le système, à son avis, faisait le malheur de Saint-Domingue. Il se tenait au Cap, chef-lieu de son commandement ; il était toujours en lutte avec les blancs qui, fiers de la protection du colonel (général) Christophe, n’avaient pas pour lui les égards qu’ils lui devaient. Dans le courant de vendémiaire an x (octobre 1801) il se trama au Cap une conspiration dont les rayons se prolongeaient au Port-Margot, à la Marmelade,