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travait beaucoup les transactions commerciales. On peut concevoir aussi que les troubles survenus à cette époque, la mésintelligence qui éclata entre le général en chef et l’agent Hédouville, et les agitations qui eurent lieu pour le contraindre à son tour à s’embarquer, durent porter une grande perturbation dans les affaires. Les Anglais, négociant avec T. Louverture pour avoir le monopole du commerce dans la colonie, gênèrent autant qu’ils purent celui des neutres. Leurs navires de guerre continuaient à rester sur les côtes, pour atteindre ce but.

Mais, comme il était essentiel de favoriser l’importation des comestibles exotiques pour l’approvisionnement des habitans, le général en chef, immédiatement après avoir fait partir Caze avec ses dépêches pour le Directoire exécutif, rendit une ordonnance, le 17 novembre, à cet effet. Voici les motifs et le dispositif de cet acte :

Le peu de commerce qui se fait ici avec les Américains et les Danois ne tend qu’à enlever le numéraire. Ces étrangers apportant beaucoup de marchandises sèches et de luxe, et peu de comestibles, la colonie se trouve toujours au dépourvu de ces objets de première nécessité. Cette manœuvre mercantile opère le triple but — de soutenir la cherté des comestibles exotiques, par la pénurie où ils jettent la colonie, — d’enlever tout le numéraire, par la grande valeur de ces marchandises sèches et de luxe, — et de maintenir la denrée de la colonie à un très-bas prix, par le peu de débouché que cette manœuvre laisse aux productions territoriales. Ces abus subsistent depuis longtemps ; mais, du moment qu’ils compromettent le salut du peuple, qui est la suprême loi, il est de la sagesse du gouvernement de les détruire.

En conséquence, les ordonnateurs de cette colonie devront acquérir les cargaisons des navires étrangers, payables en denrées coloniales, au cours.

Ils emploieront les comestibles pour le service public ; mais ils sont autorisés à faire vendre pour du numéraire, avant de déplacer, les marchandises sèches et de luxe qu’ils auront achetées.