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dre auprès de ces troupes, moins peut-être pour faire acte d’autorité en vertu de cette lettre, que pour essayer de les gagner en l’absence de Dessalines. Accueilli avec toutes les apparences de la soumission, il fut invité par Guerrier à passer une inspection des armes. Après qu’il eut parcouru le front de la 7e, ce colonel fit ouvrir les rangs pour qu’il continuât l’inspection du second rang : une fois engagé au milieu de ce corps, son arrestation devint facile. À un signe de Guerrier, il fut appréhendé par des hommes robustes qui le garottèrent immédiatement. Les quelques officiers qui l’avaient accompagné, loin de tenter aucune résistance, se mirent à fuir dans toutes les directions. Conduit aussitôt sous bonne escorte sur l’habitation Marchand, dans l’Artibonite, Lamour Dérance y fut détenu aux fers et périt peu après, de chagrin et de misère. Il était déjà d’un âge assez avancé[1].

Sa faction fut ainsi anéantie, et l’autorité de Dessalines assurée dans tout le département de l’Ouest, puisque les officiers supérieurs de cette partie l’avait déjà reconnue, par les soins intelligens de Pétion.

Ces soins, étendus dans le Sud par le concours de Geffrard, y préparèrent encore un triomphe facile au général en chef. Il arriva au camp Gérard avec les officiers de son état-major et ses guides, et y trouva réunie l’armée des indigènes.

Le souvenir des actes qu’il avait commis dans ce département sous T. Louverture, occasionna naturellement une sorte de frémissement parmi les soldats, tous pris dans les rangs des cultivateurs qui avaient tant souffert ;

  1. En 1844, j’ai entendu Guerrier, alors Président d’Haïti, raconter les circonstances de cette arrestation, en présence de plusieurs autres personnes qui étaient au palais national.