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appelle contre eux l’animadversion des lois. Des lois ! elles doivent être la raison écrite sous l’inspiration de la justice, et non de la haine, de la violence.


Nous sommes heureux, toutefois, de constater, à l’honneur du peuple haïtien, qu’à cette époque de violence et de vengeance, il se trouva des êtres qui n’en virent aucune nécessité, qui protestèrent par leurs sentimens d’humanité contre ces actes de fureur non exigés par les circonstances.

Une dissidence à cet égard se manifesta même chez le gouverneur général, dans la soirée du 1er janvier, parmi les officiers de tous grades. Tandis que les uns opinaient pour commencer immédiatement l’exécution à mort de tous les Français, d’autres disaient ouvertement que l’on devait se borner à les déporter, à les expulser du pays. Ces derniers étaient presque tous de l’ancien parti de Rigaud : c’étaient Jean-Louis François, Férou, Geffrard, Bonnet, etc. Les autres étaient plutôt de l’ancien parti de Toussaint Louverture. Cependant, on remarqua que H. Christophe s’abstenait, comme Pétion, d’émettre une opinion sur cette question[1]. Dans le dernier livre de la période française, nous avons fait remarquer aussi que Christophe n’avait commis aucun assassinat sur les blancs, à l’arrivée de l’expédition.

La discussion qui avait eu lieu et l’abstention de ces deux généraux, étant portées a la connaissance de Dessalines, il ajourna les ordres nécessaires à son projet d’extermination. Il paraît qu’il se réserva de parcourir le pays avant de les donner, sans doute pour avoir le

  1. Hist. d’Haïti, t 3, p. 120.