Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du pays, ces biens séquestrés étaient régis par l’administration des domaines et qu’ils dépérissaient chaque jour : ce système produisit d’heureux résultats, tant que dura cet état de choses. Mais alors même, et lorsque, sous le gouvernement de Dessalines, les biens des colons furent confisqués et devinrent propriétés domaniales, quelles étaient les personnes qui pouvaient le mieux affermer ces biens, les exploiter et en tirer avantage ? Quelles étaient celles qui obtenaient la préférence de l’administration, tant par leur position que par l’influence qu’elles exerçaient dans le pays ?

À ces questions, le lecteur a déjà compris que ce sont les chefs militaires supérieurs, les hauts fonctionnaires publics et les individus qui, tenant un rang élevé dans la société, jouissaient d’une grande considération auprès des autorités. À ce sujet, il suffit de rappeler que, sous Toussaint Louverture, le général Dessalines avait pour lui seul, 32 grandes habitations sucreries affermées de l’administration des domaines. Dans un tel état de choses, l’officier subalterne pouvait-il espérer même d’avoir une ferme de cette administration ? Il en fut ainsi, ou à peu près, sous le régime impérial.

Le régime républicain ayant remplacé celui-là, les choses devaient changer. C’est ce dont Pétion paraît s’être pénétré : il craignait sans doute que l’influence des officiers supérieurs prépondérât encore dans le fermage des biens domaniaux. En outre, il prévoyait la difficulté d’obtenir exactement des fermiers de ces biens, le payement du fermage dans un moment où la guerre civile réclamait toutes les ressources financières du pays.

En effet, six jours après sa proposition, la loi du 13 avril ordonnait le payement d’un arriéré assez considéra-