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nel Henry et la 18e, qu’à l’arrivée de Borgella, que Rigaud renvoya à Jérémie dans ce but. Quant à Wagnac, il suivit le torrent, mais avec la secrète pensée d’agir plus tard en faveur de Pétion, ainsi qu’on le verra. Nous ne parlons pas du général Vancol, qui commandait alors l’arrondissement de Tiburon, parce qu’il était déjà une nullité par l’usage immodéré des liqueurs fortes, qui le rendit fou à la fin. Le colonel Bigot se rallia à la séparation, avec la 19e : elle était déjà consommée.

Ainsi, tous les hommes de valeur dans l’ordre militaire, n’approuvèrent point d’abord la séparation du Sud : ils y adhérèrent sans conviction politique, plus par ménagement pour Rigaud qui s’était trop compromis ; et certes, dans la situation du pays à cette époque, le pouvoir militaire représentait plus la volonté du peuple, que les faiseurs de procès-verbaux, [1] qui parlaient en son nom et qui n’étaient que les organes de Blanchet, dirigeant le vieux Révolutionnaire dans une entreprise non motivée par les circonstances, pour en faire le chef d’une faction inconséquente.

L’adjudant-général Voltaire était descendu aux Cayes, quelques jours après l’arrivée de Rigaud, sur la démarche de sa femme ; mais, conservant sa fidélité au président, il refusa d’adhérer aux instances qu’on lui fît et partit pour Jacmel, avec le commandant Tate, dévoué sans bornes à Pétion. Le 7 novembre, Rigaud écrivit au général Marion, beau-frère de Voltaire et commandant de l’arrondissement de Jacmel, pour lui expliquer les causes

  1. J’emprunte cette expression à Borgella qui, en me racontant ces événemens, me dit : « Ces faiseurs de procès-verbaux nous ont entraînés dans une scission qui a failli être cause de notre perte. S’il avait fallu combattre contre l’Ouest, on n’en aurait pas vu un seul à l’armée. » De même dans les événemens de 1806, le pouvoir militaire était réellement le représentant du peuple.