Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/537

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voya un frère de Jean-Bapliste Lagarde, qui était allé dans le Nord, avec des armes, des tambours, une trompette et environ 40 quarts de cartouches : cet agent des insurgés débarqua ces objets entre Corail et Pestel[1]. Mais, quoi que fît S. M. Très-Barbare, Goman et son lieutenant restèrent assez paisiblement, pour que les généraux Henry et Wagnac pussent envoyer au Port-au-Prince des détachemens de troupes pendant le siège ; ils y expédièrent aussi de la poudre, des boulets, et des vivres et grains du pays pour la subsistance des troupes[2].

Le colonel Tahet, commandant provisoire de l’arrondissement de Nippes, en expédiait habituellement aussi. Comme plus voisin de l’Ouest, cet arrondissement avait des rapports commerciaux plus fréquens avec le Port-au-Prince, que tous les autres du Sud : le président se décida, par ce motif, à publier le 14 mai, un arrêté qui y autorisait la circulation de la petite monnaie extraite des piastres fortes, en 1814, que le peuple appelait d’Haïti.

Il y en avait une fabrique vraiment populaire au Port-au-Prince ; car, pendant le siège, chacun frappait de cette monnaie à son aise, sauf les risques qu’on courait d’être emporté par les boulets. Dès la fin de 1811, des orfèvres de la ville l’avaient contrefaite : — c’était si fa-

  1. Lettre du général Wagnac à Pétion, rapportant la déclaration d’un insurgé fait prisonnier, en date du 19 avril.
  2. Le 21 mai, le trésorier Cator, chargé du service de l’administrateur Pinet, écrivit au président que cette administration était sans argent et sans crédit ; il y contribuait peut-être. Et le 2 juin, il expédia au Port-au-Prince 172 barils de farine, que le général Wagnac prit de force chez les commerçans qui refusaient de vendre a l’État. Quels que fussent ces commerçans, étrangers ou nationaux, ils étaient de la pire espèce de leur profession, et Wagnac eut raison d’agir ainsi, pour alimenter les troupes assiégées. Les frères Gaspard écartés de tout emploi dans la marine, offrirent néanmoins leur service gratuit en transportant ces approvisionnemens sur leur goëlette-caboteur.