clara que ses troupes avaient bien mérité de la patrie. C’était répondre au décret du sénat, du 22 mai : aux yeux de chacun des deux pouvoirs, la patrie, en effet, était respectivement de leur côté, puisque la guerre civile en déchirait le sein.
Après avoir fait habiller et solder son armée pour la porter ensuite contre le Port-de-Paix, il fit rendre une loi par le conseil d’État, le 20 juin, qui affranchit de tous droits à l’exportation, le sucre, le coton et le cacao, et abolit le quart de subvention qu’on prélevait sur les fermiers des biens du domaine, indépendamment du prix du fermage ; mais le café continua à payer le droit de 10 pour cent à l’exportation, outre le quart de subvention sur les produits des propriétaires.
Dans ces circonstances, un corsaire français armé à Santo-Domingo, dont l’équipage était formé des naturels du pays, ayant fait naufrage sur les côtes du Nord, on lui porta secours en sauvant l’équipage et des marins anglais, prisonniers à bord, provenant de plusieurs navires que le corsaire avait capturés. Le généralissime procura à ces derniers les moyens de se rendre à la Jamaïque, et aux Français un sauf-conduit pour aller à Santo-Domingo. C’était agir humainement et avec discernement à l’égard des uns et des autres : les Anglais étaient rendus à la liberté, et leurs ennemis trouvaient un procédé généreux en un chef qui pouvait les traiter comme ennemis de son pays, puisqu’on était en guerre. Cet acte de Christophe, inspiré par la raison et la justice qu’il aurait dû toujours prendre pour guides, porta d’heureux fruits pour son pouvoir, des deux côtés : les Anglais lui surent bon gré de la protection qu’il accorda à leurs nationaux, et les habitans de l’Est d’Haïti furent portés à croire que les atro-