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générale de tous les esclaves de la province de Venezuela et de toutes autres qu’il réussirait à réunir sous les drapeaux de l’indépendance. »

N’eût-il pas eu lui-même un caractère généreux, Bolivar aurait cédé à l’ascendant de cet esprit supérieur, plaidant la cause des esclaves après s’être dévoué à la défense de la liberté en Haïti. Il n’ignorait pas la carrière militaire et politique du chef auquel il s’adressait, et il n’avait qu’à ouvrir les yeux pour voir les heureux effets de la liberté dans le pays qu’il visitait pour la première fois. En ce temps-là, son indépendance nationale était encore menacée de toute la puissance de la France, et Bolivar voyait toutes les classes de citoyens jaloux de défendre et de maintenir leurs droits, mais calmes et rassurés sur leur triomphe indubitable, à l’ombre des lois et sous la conduite de leur modeste président. Il promit à Pétion de remplir ses vues équitables. Et disons-le une fois, il fut fidèle à sa parole, en proclamant la liberté générale successivement à Margarita, à Carupano, à Ocumare, en faisant plus encore pour cette cause sacrée ; car il libéra ses propres esclaves au nombre de 1,500, dans son vaste domaine de San-Matéo, près de Caracas. Il acquit cette gloire, plus pure aux yeux des hommes sensés, plus méritoire aux yeux de Dieu, que tous ses succès éclatans, rien que par son contact avec Pétion, qu’en lisant, pour ainsi dire, au fond de ce cœur bienfaisant[1].

Le 4 janvier, Pétion avait déjà vu Bolivar. Il écrivit

  1. Bolivar fut fidèle à sa parole donnée à Pétion ; mais une opposition formidable s’éleva contre la liberté des esclaves. En 1821, une liberté graduelle fut proclamée, et ce n’est qu’en 1854 que les derniers esclaves ont été libérés, par l’influence du général Monagas, Président de la République de Venezuela.