Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/226

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voir ; si, dans aucun cas, le sénat n’avait pas le droit d’appeler le Président d’Haïti dans son sein, pour faits de l’administration de ce chef : comment le sénat aurait-il pu examiner ce qui donnerait lieu à accusation contre le président, afin qu’il fût jugé par la haute cour de justice ? Pour procéder à un tel examen et se convaincre de la nécessité de décréter sa culpabilité, — ou plutôt sa mise en accusation, — il eût fallu l’entendre en l’appelant dans le sein du sénat ; car ce corps ne devait pas émettre un acte d’accusation contre lui sur la seule correspondance entretenue entre eux.

Nous croyons qu’il suffit de ces remarques pour prouver l’incohérence qui existait entre ces différens articles, l’impossibilité d’atteindre le but de la constitution ; car elle voulait évidemment que l’on comprît que le Président d’Haïti, premier magistrat de la République, ne pouvait être ni irresponsable, ni inviolable, en vertu du principe posé dans l’art. 32 : « la responsabilité individuelle est formellement attachée à toutes les fonctions publiques. »

Eh bien ! en présence de dispositions aussi incohérentes, il ne restait plus que la voie révolutionnaire, semée de dangers pour le pays. Car, n’était-ce pas, en droit constitutionnel, établir la possibilité du renouvellement du fait scandaleux et démagogique passé dans la séance du sénat, le 17 décembre 1808 ?

Dès lors, la constitution avertissait le Président d’Haïti de se prémunir contre tout attentat à son pouvoir ; et il est probable qu’il y prendrait garde et que, ayant la force armée sous ses ordres, au moindre signe d’opposition factieuse qui se manifesterait dans le sénat, il tenterait lui-même de l’opprimer.