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autres officiers qui étaient dans le cortège, et ce char fut tiré par eux tous, en signe du profond regret qu’ils éprouvaient de la perte de ce chef bien-aimé[1].

Quel autre chef que Pétion a jamais obtenu à sa mort des témoignages aussi flatteurs de considération, d’estime et de gratitude ? Qui les a mérités autant que lui ? Aucun !…

Après que son corps eut été déposé dans le caveau que l’on avait construit avec diligence, le cortège se dirigea au fort National où les entrailles furent également placées dans un caveau qui y avait été préparé[2].

Il faut ici rendre justice au général Boyer, pour les mesures d’ordre qu’il prit dans ces jours de deuil, pour le soin qu’il eut de rendre les funérailles de Pétion aussi pompeuses qu’elles pouvaient l’être. Il le devait à celui qui l’aima toujours d’une affection particulière, qui lui en donna des preuves multipliées, qui fut enfin, on peut le dire, son bienfaiteur. En cette circonstance, il trouva, d’un autre côté, tous les citoyens disposés à le seconder ; car leurs peines étaient trop réelles, pour qu’ils ne sentissent pas que c’était le moyen d’honorer la mémoire du Père de la Patrie : les plus humbles comme les plus élevés dans la société s’unirent dans ce sentiment. C’est le plus bel éloge qu’on puisse faire du peuple, composant alors la République d’Haïti.

Si dans tous ses arrondissemens, dans ses différentes villes, dans ses moindres bourgades, la mort de Pétion fut considérée comme un malheur public, aux Cayes on

  1. Parmi les aides de camp de Pétion, on distinguait le chef d’escadron Vicsama dont l’attachement et la vénération pour le président ont été constans : ce qui honore son cœur.
  2. La famille de Pétion garda durant plusieurs années, dans un oratoire, l’urne qui contenait son cœur ; et elle la plaça ensuite dans le caveau où est le cerceuil et où un petit autel été dressé, Là fut placé aussi le cerceuil où gît Célie, décédé en 1825.