Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 9.djvu/196

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le même jour ne fut mise en cause avec Félix Darfour, qui subit seul la punition qu’il encourut par son odieux écrit. Tout porte à croire que son audacieuse accusation, dirigée contre le Président d’Haïti, n’était qu’une ramification de la trame ourdie par Paul Romain dont il était un complice ignoré jusqu’alors, puisque cette accusation reposait principalement sur les mêmes faits imputés au président ; ou, qu’adoptant les soupçons injurieux qui planaient sur le Président, à propos de la mort violente de ce général, Darfour aura cru qu’il pouvait profiter des dispositions que montraient certains représentans à faire une vive opposition à Boyer, pour le dénoncer à la Chambre et provoquer ainsi son renversement par la voie révolutionnaire.


Les art. 149 et 159 de la constitution donnaient au Président d’Haïti le droit et même lui prescrivaient le devoir, de faire arrêter par ses propres ordres, et Darfour et les autres personnes, mais sous la condition de les dénoncer par devant le tribunal compétent à les juger, s’il était informé qu’ils tramaient une conspiration contre la sûreté intérieure de la République. Mais, à vrai dire, s’il avait des suspicions contre les représentans qui furent arrêtés, de conniver avec Darfour, et contre les autres personnes considérés comme leurs complices, il eût été difficile d’en fournir la preuve. La simple lecture de la pétition avait soulevé une louable indignation dans le sein de la Chambre, et il n’est nullement présumable que les représentans ni les autres personnes, arrêts en même temps, eussent conçu le même projet que l’auteur de la pétition. Boyer préféra attribuer ces arrestations « à un mouvement spontané de patriotes, » du moins celle de Darfour, d’après sa lettre au général Thomas-Jean : ce qui devenait plus commode.