Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 9.djvu/297

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Et il dit, des noirs et mulâtres libres dont il s’agissait : » Ces personnes de couleur elles-mêmes doivent être fixées sur ce qu’elles ont à espérer ; elles ont, vous le savez, leurs préjugés, leurs habitudes de la vie et celles de l’éducation ; ne manquez pas de réfléchir sur tout cela. Quoique leur état ici soit des plus lamentables, encore elles sont parfaitement ignorantes, sans aucune instruction ; elles ne sont libres que de mot, et cependant elles ne sont pas assez pénétrées de l’horreur de leur situation pour chercher à en sortir. Il faut qu’on leur présente l’aspect de quelques avantages pour qu’elles se décident à changer leur état. Il y a beaucoup de blancs qui, vraiment, sont désespérés du malheureux sort de cette portion de nos semblables, qui gémissent de leur ignorance, et qui feraient avec plaisir tout ce qui pourrait leur garantir une meilleure condition ; mais ils ont reconnu qu’on les a tellement dégradés, que l’opinion publique les a tellement accablés, qu’il est impossible de relever, en ce pays-ci, leur moral et de les y faire jouir de quelque bien-être… Ces hommes bienveillans cherchent donc un asile pour les infortunés enfans de l’Afrique dans quelque autre pays, etc. »

Le 30 avril suivant Boyer répondit à cette lettre : « Dès que j’ai été informé de la détermination prise aux États-Unis, de transporter en Afrique nos malheureux frères pour les rendre, disait-on, à leur ciel natal, j’ai compris la politique qui avait suggéré cette mesure, et en même temps j’ai conçu une haute opinion des hommes généreux qui se disposaient à faire des sacrifices, dans l’espoir de préparer aux infortunés qui en étaient l’objet, un asile où ils pussent parvenir à se procurer une existence supportable. Dès lors, par une sympathie bien