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naissance préalable, sans laquelle il serait impossible d’entamer des négociations à d’aussi grandes distances, et d’éviter les lenteurs qu’entraînerait nécessairement un malentendu. La crainte de ne pouvoir causer seul avec V. E. m’a engagé à lui écrire, pour lui faire connaître les dispositions bienveillantes de S. M. le Roi de France. »

Si le gouvernement du Roi désirait connaître les intentions de Boyer, il était aussi naturel que celui-ci désirât connaître quelles étaient ces dispositions bienveillantes dont parlait son envoyé semi-officiel. Il paraît donc que M. Dupetit-Thouars eut des entretiens avec Inginac et Boyer, qui motivèrent sa seconde lettre adressée à ce dernier, le 8 mai. Inginac surtout, avec sa finesse habituelle, son talent de faire dire à un interlocuteur ce qu’il désirait savoir, de promettre qu’il seconderait ce qu’il était disposé à repousser dans les conseils du gouvernement, paraît être celui qui porta M. Dupetit-Thouars aux aveux consignés dans cette lettre :

Au Cap-Haïtien, le 8 mai 1821.

À S. E. le général Boyer, Président de la République d’Haïti.
Monseigneur,

Le conseil de S. M. avait pensé que ce qu’il y aurait de plus avantageux pour la France, et peut-être aussi pour le pays que gouverne V. E, serait que vous voulussiez reconnaître la souveraineté de la France, aux conditions qui vous avaient été soumises en 1816 (à Pétion) par MM. Esmangart et de Fontanges, en y ajoutant même quelques nouvelles concessions[1].

Ayant acquis la conviction que cette base ne peut être admise, je dois faire connaître à V. E., que S. M., désirant le bonheur des habitants de la partie de l’île soumise à votre domination, et non de porter parmi eux le trouble et la guerre civile, avait pensé qu’une

  1. De la part de la France, sans doute, et non d’Haïti, qui en aurait fait assez déjà, beaucoup trop même, si elle avait concédé sa souveraineté.