Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/10

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faibles proportions, ne pouvait être un obstacle sérieux à la tranquillité publique obtenue par la modération du chef de l’État.

Dans la partie de l’Est d’Haïti, une population paisible s’était replacée sous la domination absolue de son ancienne métropole. Rien ne faisait prévoir actuellement aucune altération dans ces nouvelles relations. Mais comme cette population allait subir, lentement il est vrai, l’influence des idées révolutionnaires qui avaient provoqué déjà l’émancipation de plusieurs colonies de l’Espagne en Amérique, et celle des principes réformateurs de cette vieille monarchie, introduits dans la constitution de 1812 par les Cortès, à la suite de l’invasion française, la situation de l’Est devait changer avec le temps.

Si cette dernière portion du territoire haïtien n’avait presque rien à craindre de la France contre laquelle ses habitans s’étaient insurgés, parce qu’alors, — en 1812, — les armées de cette puissance éprouvaient des revers parla résistance héroïque de l’Espagne, et qu’une rétrocession de ce territoire, de sa part, pouvait en être un résultat, il n’en était pas de même pour la partie occidentale de l’île, toujours tenue sous la menace d’une expédition française, dans le cas où la paix générale aurait lieu en Europe. En paix elle-même avec le reste du monde, depuis la déclaration de l’indépendance ; recevant dans ses ports les navires de toutes les nations commerçantes, la partie occidentale ne voyait pas un seul gouvernement se prononcer encore sur son existence politique. Cet état de choses dénotait que les préjugés de race, nés du régime colonial, réservaient la question tout entière en faveur de la France.