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L’événement qui suivit, et les circonstances qui l’accompagnèrent, peuvent sans doute donner un sens lugubre à ces paroles de Pétion ; mais il se peut aussi qu’elles étaient toutes naturelles de sa part, attendu qu’il avait déjà engagé Borgella à prolonger son séjour à la capitale.

On a toujours dit que dans ses maladies, Pétion faisait peu d’usage des médicamens de toutes sortes, et qu’il avait résisté longtemps à l’emploi d’un traitement sudorifique que lui donna enfin le docteur Mirambeau, son médecin, et qui le guérit de l’affection cutanée qui avait été si souvent cause, il paraît, des douleurs chroniques dont il souffrit. Il n’est donc pas étonnant que dans cette dernière maladie, il ait encore répugné à prendre les médicamens qu’on lui offrait. À l’égard des alimens qu’il aurait également refusés, dit-on, cela se conçoit encore mieux : ordinairement, la fièvre en dégoûte, et la nature elle-même les repousse, quand on est malade.

Mais, à cette époque, on tira mille inductions de ces particularités. On prétendit que Pétion était fatigué, dégoûté de la vie, qu’il se laissa volontairement mourir de faim. D’autres ont dit, ont cru peut-être, qu’en ne prenant ni alimens ni médicamens, c’est qu’il craignait d’être empoisonné. Cette absurdité se réfute d’elle-même ; car, qui lui aurait inspiré une telle crainte dans cette dernière maladie, lorsque dans les précédentes il n’en

    après un seul accès de fièvre, et que tout en lui semblait présager une mort prochaine. Mon père l’engagea alors à différer son départ, et Borgella lui apprit que le président le lui avait conseillé, mais qu’il lui avait répondu qu’il était nécessaire qu’il retournât chez lui. Un instant après, Solages et Chardavoine, ses aides de camp, rentrèrent et opinèrent pour le départ, en disant à leur général, que depuis quelque temps Pétion étant souvent malade, il fallait espérer qu’il n’y aurait aucun résultat fâcheux de sa maladie actuelle. Le lundi au jour, ils se mirent en route.