verre que je mêlai avec du tabac d’Espagne excessivement fort ; j’en composai dix ou douze paquets, et, lorsque je les eus préparés, j’écrivis cette lettre à Sylvie.
Je vais mourir, cruelle, et c’est vous qui conduisez les coups qui me font descendre dans le tombeau ; je vous pardonne de m’avoir rendu malheureux ; mais je ne puis souffrir que vous m’accusiez d’être cause de vos infortunes. Au moment que vous lisez cette lettre, je ne vis plus ; oubliez mon trépas, si cela peut bannir votre infidélité de votre mémoire.
J’envoyai cette lettre à Sylvie par celui qui nous apportait à manger, et, comme nous allions nous mettre à table et que nous étions tous enfermés dans la même chambre, je pris les balotes de poison que j’avais, et, à la première cuiller de soupe que j’avalai, j’en glissai une. À la seconde que je voulus prendre, le tabac d’Espagne s’étant fondu dans ma bouche, je devins violet ; dans le moment, le comte Baratieri, qui s’en aperçut, se doutant de quelque chose, se jeta sur moi ; on me trouva le reste du poison sous ma serviette. On me fit avaler de l’huile malgré mes efforts, ce qui m’ayant fait vomir empêcha que le