Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/295

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signalé contre la société des jésuites. Elle crut ne pouvoir mieux se venger qu’en choisissant un tel confesseur : la haine et la vengeance étaient les seuls mobiles qui fissent agir la Cadière au commencement ; mais bientôt l’Amour s’en mêla. Ce dieu ne perd jamais ses droits, non pas même avec les dévotes.

Le carme à qui elle s’était adressée, était beau, bien fait, les yeux vifs et brillans, l’air mâle et vigoureux, les dents belles, la main blanche et potelée ; elle ne put le voir d’un œil indifférent. Les sentimens mystiques avaient répandu dans son cœur une disposition à la tendresse, qui n’attendait, pour se déterminer, qu’un sujet qui en fût digne. Le carme était connaisseur ; il alla au-devant de sa pénitente, et lui épargna la honte des avances ; il voulut bien en faire les frais.

Elle lui sut bon gré de l’avoir prévenue. Quand des cœurs sont épris et qu’ils veulent la même chose, on avance vite chemin ; aussi le firent-ils. La Cadière était en possession d’avoir, les matins, au chevet de son lit, son directeur. Dieu sait les instructions que lui donnait le carme. La servante dépose qu’elle entendit un jour, qu’étant seule avec