Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/296

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lui, il lui donnait quelques coups sur les fesses, en lui disant : petite coquine ; ce n’était pas là prendre la précaution de mettre un mouchoir sur la gorge, pour voir la plaie du sein.

L’amour ayant uni ces deux amans, leur haine mutuelle pour les jésuites se réveilla ; ils jurèrent, dans leur transport amoureux, la perte de la société dans un de ses principaux membres.

Pendant que cette cabale se formait contre le père Girard, il prêchait tous les jours avec un applaudissement extraordinaire. Les autres dévotes qui lui restaient étaient plus aisées à conduire que la Cadière. Sa réputation augmentait ; sa vanité et son orgueil triomphaient ; il n’était point de père et de mère qui ne le souhaitassent pour directeur de leur famille, et cette passe même aigrissait la haine et le désespoir de la Cadière et de son amant.

Ils étaient résolus de le perdre ; mais il fallait trouver des moyens sûrs. Ils crurent qu’ils devaient se venger eux-mêmes, et qu’ils ne devaient remettre ce soin à personne autre. La Cadière se chargea de porter les premiers coups ; elle fit une déposition pardevant le lieutenant de Toulon, dans laquelle elle