Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/356

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Lorsque j’examine ce qui peut avoir occasionné ce caprice, je n’en saurais deviner la cause. Successeurs des Grecs pour le goût du théâtre, pourquoi n’avons nous point imité leur façon de penser sur ceux qui le font

    lui eut entièrement abandonné la place, elle commença à le regarder sans prévention, et trouva qu’elle en pouvait faire un amusement agréable. La pièce de Psychée que l’on jouait alors seconda ses desseins, et donna naissance à leurs amours. La Guérin représentait Psychée à charmer ; et Baron, dont le personnage était l’amour, y enlevait les cœurs de tous les spectateurs. Les louanges communes que l’on leur donnait les obligèrent de s’examiner de leur côté avec plus d’attention, et même avec quelque sorte de plaisir. Baron se fut à peine aperçu du changement qui s’était fait dans le cœur de la Guérin en sa faveur, qu’il y répondit aussitôt ; il fut le premier qui rompit le silence par le compliment qu’il lui fit sur le bonheur d’avoir été choisi pour représenter son amant, et qu’il devait l’approbation du public à cet heureux hasard, qu’il n’était pas difficile de jouer un personnage que l’on sentait naturellement, et qu’il serait toujours le meilleur acteur du monde si les choses étaient de la même manière. La Molière répondit que les louanges que l’on donnait à un homme comme lui étaient dues à son mérite, et qu’elle n’y avait nulle part ; que cependant la galanterie d’une personne qu’on disait avoir tant de maîtresses ne la surprenait pas,