Page:Aristophane, trad. Talbot, 1897, tome 2.djvu/476

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essuie les paupières : Panakéia lui enveloppe la tête d’un voile de pourpre, ainsi que le visage ; le Dieu souffle, et aussitôt deux énormes dragons s’élancent hors du temple.

LA FEMME.

Bons dieux !

KARIÔN.

Ceux-ci, s’étant glissés doucement sous la pourpre, lèchent les paupières, à ce qu’il m’a semblé ; et, en moins de temps, maîtresse, que tu n’en mets à boire dix kotyles de vin, Ploutos se dresse voyant clair. Moi, de plaisir, je bats des mains et je réveille mon maître. Aussitôt le Dieu disparaît, et les serpents rentrent dans le temple. Mais les gens couchés auprès de Ploutos l’embrassent comme tu penses, et restent éveillés toute la nuit, jusqu’à ce que brille le jour. Pour moi, je remercie le Dieu de toutes mes forces pour avoir vite redonné la vue à Ploutos et rendu Néoklidès plus aveugle.

LA FEMME.

Quelle puissance tu as, souverain maître ! Alors, dis-moi où est Ploutos.

KARIÔN.

Il vient. Mais il y avait autour de lui une foule immense. Les hommes justes depuis longtemps, et réduits à une petite vie, l’embrassaient et lui serraient tous la main de plaisir. Les riches et ceux qui menaient une vie large, acquise aux dépens de la justice, fronçaient le sourcil et prenaient en même temps un air rébarbatif. Les premiers lui faisaient cortège, la tête couronnée, le rire aux lèvres, les bénédictions à la bouche ; la terre résonnait sous les