Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1139

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ronger. Quand on domine cette étrange fantaisie, on n'est pas louable pour cela, ni blâmable non plus pour ne pas la vaincre; ou du moins, la victoire ou la défaite sont de bien peu d'importance. D'antre part, il y a des emportements qui sont de nature. Ainsi, par exemple, un fils, comparaissant devant le tribunal pour avoir frappé son,père, se défendit en disant aux juges : « Mais, lui aussi, il a frappé son père » . Et il fut absous ; car il sembla aux juges que c'était là un délit naturel qui était dans le sang. Ce qui n'empêche pas que, si quelqu'un, dams un certain cas, a été assez maître de soi pour ne pas frapper son père, il ne mérite pas du tout la louange pour s'être défendu de cette odieuse action.

§ 21. Mais ce n'est pas de l'intempérance et de la tempérance, considérées sous ces rapports exceptionnels, que nous nous occupons ici ; nous n'étudions que les espèces de tempérance et d'intempérance qui nous rendent absolument dignes, ou de louange, ou de blâme. Parmi les biens, les uns nous sont extérieurs comme la richesse, de pouvoir, les honneurs, les amis, la gloire. Il y en a d'autres qui nous sont nécessaires et qui sont corporels, comme ceux qui se rapportent au toucher et au goût. L'homme qui est intempérant dans les choses de ce dernier ordre est, à ce qu'il me semble, celui qu'on doit, absolument parlant, appeler intempérant. Les fautes qu'il commet se rapportent uniquement au .corps; et c'est à ce genre d'excès que se borne l'intempérance que nous prétendons