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Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1188

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qui est aimé, l'emporte sur l'autre, soit par le plaisir qu'il procure, soit par sa richesse, soit par sa vertu ; et l'ambitieux ne désire que la supériorité.

§ 39. Or, ceux qui se sentent cette supériorité pensent qu'ils ne doivent pas aimer eux-mêmes ; ils trouvent qu'ils payent de reste, du côté où ils sont supérieurs, ceux qui les aiment; et comme ceux-ci leur sont encore inférieurs, les autres supposent qu'ils doivent en être aimés et non pas les aimer eux-mêmes. Au contraire, celui qui a besoin et manque ou de fortune, ou de plaisir, ou de vertu, admire celui qui l'emporte sur lui par tous ces avantages ; et il l'aime pour les choses qu'il en obtient, ou qu'il espère en obtenir.

§ 40. On peut dire encore que toutes ces amitiés naissent de la sympathie, en ce sens qu'on ressent de la bienveillance pour quelqu'un et qu'on lui veut du bien. Mais l'amitié qui se forme ainsi ne renferme pas toujours toutes les conditions requises ; et souvent, tout en voulant du bien à quelqu'un, on veut cependant vivre avec un autre que lui.

§ 41. Sont-ce là du reste les affections et les sentiments de l'amitié ordinaire ? Ou bien sont-ils réservés à cette amitié complète qui ne se fonde que sur la vertu? Toutes les conditions se trouvent réunies dans cette noble amitié. D'abord, on ne peut pas désirer vivre avec un autre ami que celui-là, puisque l'utile, l'agréable,