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Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/12

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c'est de les appliquer. Ainsi, pour ce qui regarde la vertu, il ne peut pas suffire de savoir ce qu'elle est ; il faut en outre s'efforcer de la posséder et de la mettre en usage. Si les discours et les écrits étaient capables à eux seuls de nous rendre honnêtes, ils mériteraient bien, comme le disait Théognis, d'être recherchés par lout le monde et payés au plus haut prix. Mais, par malheur, tout ce que peuvent les préceptes en ce genre, c'est de déterminer quelques jeunes gens généreux à persévérer dans le bien, et de faire d'un cœur bien né et spontanément honnête, un ami inébranlable de la vertu. »

Ce ne serait pas déjà si peu de chose, quoi qu'en ait pensé le philosophe ; et par son livre, n'eût-il sauvé qu'une seule âme, il n'aurait pas à se repentir de l'avoir fait. En voyant l'ignorance incurable de la foule, « que la raison ne peut à elle seule persuader, et qui obéit à peine aux châtiments les plus rudes », Aristote a cédé un peu trop au découragement; et l'on pourrait presque croire, à l'entendre, qu'il regrettait d'avoir consacré tant de méditations et de veilles à un ouvrage que si peu de gens pouvaient lire , et dont bien moins encore devaient savoir profiter.