Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

principalement doit tendre toute cette étude, à savoir de connaître les moyens de s’assurer une existence bonne et belle, si l’on ne veut pas dire parfaitement heureuse, mot qui peut sembler trop ambitieux ; et de satisfaire l’espérance qu’on peut avoir, dans toutes les occasions de la vie, de ne faire que des choses honnêtes. § 5[1]. Si l’on ne fait du bonheur que le résultat du hasard ou de la nature, il faut que la plus grande partie des hommes y renoncent ; car alors l’acquisition du bonheur ne dépend plus des soins de l’homme ; il ne relève plus de lui ; l’homme n’a plus à s’en occuper lui-même. Si au contraire on admet que les qualités et les actes de l’individu peuvent décider de son bonheur, dès lors, il devient un bien plus commun parmi les hommes ; et même un bien plus divin ; plus commun, parce qu’un plus grand nombre pourront l’obtenir ; plus divin, parce qu’il sera la récompense des efforts que les individus auront faits pour acquérir certaines qualités, et le prix des actions qu’ils auront accomplies dans ce but.

  1. Le résultat… de la nature. C’est cependant à peu près l’opinion qui est soutenue plus loin, livre VII, ch. 14. — La plus grande partie des hommes y renoncent. En fait, la plupart des hommes sont malheureux ; mais ils ne renoncent pas à l’espoir du bonheur. Du reste, tous les sentiments exprimés dans cette fin de chapitre sont excellents ; et dans la Morale à Nicomaque, Aristote n’a rien dit de mieux. C’est une vérité des plus importantes que le bonheur de l’homme dépend en effet en grande partie de sa conduite et de sa volonté. C’est une loi de la providence.