Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1235

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étudier une occasion différente, une science différente qui doit étudier une mesure différente. Ainsi en fait d’alimentation, c’est ou la médecine ou la gymnastique qui désigne l’occasion ou le moment, et la mesure ; pour les actions de guerre, c’est la stratégie ; et c’est de même une autre science qui règle une autre action. Ce serait donc perdre son temps que de vouloir attribuer à une seule science l’étude du bien en soi. § 9[1]. En outre, dans toutes les choses où il y a un premier et un dernier terme, il n’y a pas d’Idée commune en dehors de ces termes, et qui en soit tout à fait séparée. § 10[2]. Autrement, il y aurait quelque chose d’antérieur au premier terme lui-même ; car ce quelque chose de commun et de séparé serait antérieur, puisque, si l’on détruisait le commun, le premier terme serait aussi détruit. Supposons, par exemple, que le double soit le premier des multiples ; je dis qu’il est impossible que le multiple, qui est attribué en commun à cette foule de termes, existe séparément de ces termes ; car alors le multiple serait antérieur au double, s’il est vrai que l’Idée soit l’attribution commune, absolument comme si l’on donnait à ce terme commun une existence à part ; car si la justice est le bien, le courage ne le sera pas moins qu’elle.

§ 11[3]. On n’en soutient pas moins la réalité du bien

  1. Il n’y a pas d’Idée commune en dehors de ces termes. C’est prouver la question par la question ; et ceci n’ajoute rien à la réfutation générale qu’on fait de la théorie des idées, en niant leur existence.
  2. Supposons, par exemple. Cet exemple suffit pour éclaircir la pensée, sans d’ailleurs en prouver la justesse. — Mais si la justice est le bien. Cette objection ne paraît pas se rattacher aux précédentes.
  3. Il est vrai qu’on ajoute. Le texte n’a pas tout à fait autant de précision que ma traduction ; et de plus, il a un pluriel qui semble indiquer que cette réfutation s’adresse moins à Platon individuellement qu’à toute son école. — Éternel et séparé. L’auteur aurait dû voir qu’en effet le bien, au sens où l’entend Platon, est éternel et séparé, puisqu’il est Dieu lui-même, ou du moins qu’il est en Dieu. — Ce qui est blanc. Voir la Morale à Nicomaque, livre I, ch. 3, § 6. — Et l’on ne peut pas confondre… Objection d’un ordre tout différent que les précédentes.