Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/124

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celui qui ne serait que l’effet de circonstances favorables, il y a lieu de croire que c’est ainsi qu’il faut l’acquérir. Et, s’il est vrai que les choses naturelles doivent à la nature leur plus haut degré de perfection, il en doit être de même des choses qui sont le produit de l’art, ou de quelque cause que ce soit, et surtout de la plus parfaite de toutes. Car il y aurait aussi trop d’absurdité à livrer au hasard ce que nous avons de plus noble et de plus précieux.

La solution de la question qui nous occupe, sort même évidemment de notre définition. Le bonheur, avons-nous dit, est un emploi de l’activité de l’âme, conforme à la vertu ; et quant aux autres biens, les uns sont nécessaires pour le rendre complet, et les autres y servent naturellement comme des auxiliaires, ou d’utiles instruments. Or, cela s’accorde avec ce que nous avons dit au commencement de ce Traité ; car nous avons avancé que la fin de la politique est la plus excellente, parce qu’elle s’applique principalement à donner aux citoyens de certaines qualités, à les rendre vertueux, à leur faire acquérir l’habitude de pratiquer le bien. C’est donc avec fondement que nous ne disons jamais ni d’un cheval, ni d’un bœuf, ni d’aucun autre animal, qu’il est heureux ; car il n’y en a aucun qui soit susceptible du genre d’action ou d’activité qui constitue le bonheur. Par la même raison, nous ne le disons pas non plus d’un enfant que son âge tendre rend encore incapable de cette sorte d’activité : ou, si nous employons cette ex-