Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/131

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Pourquoi donc ne dirions-nous pas que l’homme heureux est celui qui agit d’une manière conforme à la vertu dans sa perfection, et qui, de plus, est suffisamment pourvu des biens extérieurs, non pas pour un temps indéterminé, mais dans une vie parfaite ? Ou bien, faut-il ajouter encore qu’il continuera de vivre ainsi, et qu’il mourra comme il convient à une telle vie ? tandis qu’il nous est impossible de lire dans l’avenir, et que nous avons déclaré que le bonheur est la fin suprême et absolue de tous nos vœux et de toutes nos actions. Et, s’il en est ainsi, nous pourrons déclarer heureux ceux qui vivent actuellement, tant qu’ils réunissent et qu’ils réuniront les conditions que nous venons de dire ; mais cette félicité sera seulement celle que comporte la nature humaine. Voilà donc un point suffisamment éclairci.

XI. Cependant, prétendre que le sort de nos enfants et de nos amis ne nous intéresse en aucune façon (après notre mort), serait une assertion trop dure et trop contraire aux opinions reçues. Mais, d’un autre côté, comme les événements auxquels ils sont exposés peuvent être extrêmement divers, et influer d’une manière plus ou moins favorable ou défavorable sur leurs destinées, ce serait une tâche bien pénible et presque infinie que d’entreprendre d’en faire le détail : peut-être donc suffira-t-il de les indiquer en masse et d’une manière générale. Or si, entre les infortunes qui nous touchent personnellement, il y en a qui ont une certaine gravité et une influence positive sur toute