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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/178

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ont à régler ce qui regarde les honneurs et les châtiments.

Or, on peut dire que tout ce qui se fait par contrainte, ou par ignorance, est involontaire ; et il y a contrainte dans toute action qui a son principe hors de nous, en sorte que celui qui agit, ou qui est l’objet de l’action, n’y contribue en rien : comme lorsqu’on est poussé par un vent violent, ou par des hommes qui sont maîtres de nous. Mais tout ce qu’on fait par la crainte de maux plus grands, ou par quelque motif honorable, par exemple, lorsqu’un tyran, qui tient en sa puissance vos parents et vos enfants, vous commande une action criminelle, à condition de leur sauver la vie, si vous faites ce qu’il exige, et menaçant de la leur ôter si vous refusez de lui obéir ; en pareil cas (dis-je) il est difficile de décider si une action est volontaire ou involontaire. C’est à peu près ce qui arrive au navigateur qui, battu par la tempête, jette à la mer ce qui charge son vaisseau ; car assurément personne ne consent, de gaieté de cœur et sans motif, à perdre ce qu’il possède ; au lieu que tout homme sensé en fait le sacrifice, pour sauver sa vie et celle des autres. De pareilles actions sont, pour ainsi dire, mixtes, et semblent plutôt volontaires : car, lorsqu’on les fait, elles sont le résultat d’un choix ou d’une préférence, mais la fin, ou le but, dépend des circonstances. Voyons donc ce qu’il y a de volontaire et d’involontaire dans une action de cette espèce.

Sans doute, celui qui la fait agit volontairement,