Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/285

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moins évident ; et si la bonne disposition du corps se conclut des circonstances qui l’accompagnent, réciproquement on peut conclure, de cette bonne disposition connue, l’existence de ces mêmes circonstances. Par exemple, si des muscles bien fournis sont l’indice de cette bonne disposition, nécessairement la maigreur sera le signe d’une disposition contraire ; et tout ce qui contribuera à produire l’état de vigueur et de santé, contribuera également à donner au corps le degré d’embonpoint qui convient à cet état.

Il suit de là que, presque toujours, si l’un des termes par lesquels on désigne une disposition ou une manière d’être a plusieurs acceptions diverses, celui par lequel on désigne la disposition contraire, pourra également être pris dans plusieurs sens différents. Par exemple, cela aura lieu à l’égard des mots juste et injuste, qui ont en effet plusieurs acceptions assez diverses ; mais on ne s’en aperçoit pas, parce que les idées qu’ils expriment ont une grande analogie entre elles. Au contraire, lorsque ces idées sont, s’il le faut ainsi dire, fort distantes, la différence devient évidente. Telle est, par exemple, celle qui distingue les espèces : ainsi le mot grec κλεὶς signifie à la fois l’os qui se trouve au-dessous du col des animaux [la clavicule], et ce qui sert à fermer une porte[1] [la clé.]

  1. On peut voir, dans les Apophthegmes de Plutarque, (to. 6, p. 677, éd. de Reisk.) un jeu de mots de Philippe, roi de Macédoine, à l’occasion de ce double sens du mot κλείς.