Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/315

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la nature est immuable, et a partout la même force ; ainsi le feu brûle ici, de même que chez les Perses, au lieu qu’on voit ce qui est juste sujet à des vicissitudes : mais cela n’est vrai que jusqu’à un certain point. Peut-être cette immuabilité de la justice n’existe-t-elle que parmi les dieux, tandis que chez nous il y a des choses qui sont naturellement sujettes au changement, quoique toutes ne le soient pas : il y a donc un droit naturel, et il y en a un qui ne dérive pas de la nature.

Mais il est facile de voir, entre les choses qui sont sujettes au changement, quelle est celle qui peut varier naturellement, et quelle est celle qui ne le peut pas naturellement, mais seulement par l’effet des lois et des conventions, en supposant même que les unes et les autres soient pareillement susceptibles de changer. La même distinction s’appliquera également à d’autres choses ; car on est plus naturellement porté à se servir de la main droite, et néanmoins tout homme peut devenir ambidextre. Mais il en est des choses qui sont justes par convention, et par un simple motif d’utilité ou de convenance, comme des mesures ; car celles qui servent à mesurer le vin et les grains, ne sont pas égales dans tous les pays ; on les fait plus grandes dans ceux où l’on est dans le cas d’acheter ces denrées, et plus petites, dans les pays où l’on est dans le cas de les vendre. Ainsi, les choses qui ne sont pas naturellement justes, mais qui ne le sont qu’humainement, ne sont pas partout les mêmes, car les formes de gouvernement, ne le sont pas non plus ;