Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/475

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nions, de sentiments], comme on l’a déjà dit ; mais peut-être faut-il distinguer celle qui est produite par la parenté, des liaisons qui n’ont que le plaisir ou l’amusement pour objet. Quant au lien qui unit les membres d’une même société politique, d’une même tribu, ou les hommes qui naviguent ensemble, et autres rapports de ce genre, ils ressemblent plus à ceux qui se fondent sur une communauté d’intérêts ; car on y remarque comme un consentement tacite : l’on pourrait y joindre encore les liaisons d’hospitalité.

Mais l’affection de famille se présente sous un assez grand nombre de formes diverses, et semble dépendre presque entièrement du lien qui unit les pères et les enfants[1]. En effet, les parents aiment leurs enfants, comme étant une partie d’eux-mêmes, et ceux-ci aiment leurs parents, comme tenant d’eux une partie de ce qu’ils sont. Mais les parents connaissent mieux ce qui vient, en quelque sorte, d’eux, que les enfants ne savent ce qu’ils tiennent de leurs parents ; et il y a un rapprochement naturel plus intime de la part de l’être qui a donné la vie à celui qui l’a reçue, qu’il n’y en a de ce dernier à l’auteur de son existence. Car ce qui est de notre propre substance nous appartient, en quelque manière, comme les dents, les cheveux, et, en général, tout ce qui tient à nous ; au lieu que l’être

  1. Voyez ce que notre auteur dit ailleurs sur le même sujet M. M. l. 2, c. 12 ; et Eudem. l. 7., c. 9 et 10).