Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/478

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vie ; parce que ceux qui sont nés des mêmes parents, et qui ont été nourris et élevés ensemble, ont des mœurs plus semblables, et qu’enfin, l’épreuve du temps est à la fois la plus sûre et la plus constante. Il y a des motifs analogues d’attachement dans les autres degrés de parenté.

Quant à l’affection conjugale, il semble qu’elle soit un effet direct et immédiat de la nature humaine[1] : car l’homme est porté par sa nature à vivre avec la femme, plus encore qu’à vivre en société politique ; d’autant plus (dis-je) que nécessairement l’existence de la famille est antérieure à celle de la cité, et que la propagation des espèces est une loi commune à tous les êtres animés. Mais

  1. Voyez la Politique, l. 2, § 1—2 ; Eudem. l. 7, c. 10. — Voyez aussi Cicéron (De Offic. l. 1, c. 17), où, après avoir parcouru les divers degrés d’affection qui peuvent unir les hommes entre eux, et en avoir indiqué les causes, cet illustre et grand citoyen ajoute ces paroles mémorables :Sed cum omnia ratione animoque lustraris, omnium societatum nulla est gravior, nulla carior, quam ea quoe cum republica est unicuique nostrum : cari sunt parentes, cari liberi, propinqui,familiares : sed omnes omnium caritates patria una complexa est : pro qua quis bonus dubitet mortem oppetere, si ei sit profecturus ? « Mais, toutes choses considérées par raison et par sentiment, aucune espèce de lien n’est plus cher et plus sacré que celui qui unit chacun de nous à la république. Nos parents, nos enfants, nos proches, nos amis, nous sont chers ; mais la patrie comprend à elle seule, toutes les affections de tout genre : hé quel homme de bien pourrait hésiter à lui sacrifier sa vie, si elle a besoin d’un pareil sacrifice ? » Voyez ci-dessus,chap. IX, vers la fin.