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Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/48

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question de s’expliquer en public sur quelque point de morale ou de législation, s’il avait fallu faire prévaloir quelque mesure injuste, ou prévenir les esprits faciles à s’abuser contre quelque citoyen vertueux, Calliclès aurait su, comme un autre, mettre en avant les prétextes du bien public, de la gloire et de la prospérité de l’état ; les phrases bannales de respect pour les Dieux, d’attachement pour la religion, ne lui auraient pas manqué au besoin ; mais ici, il n’a point à craindre de témoin indiscret point d’intérêts à ménager, et il va mettre dans son langage toute la franchise d’un homme qui sent sa force, et presque l’enthousiasme de l’immoralité.

Voici en peu de mots la substance des discours qu’il adresse à Socrate : « Tu ne dois l’avantage que tu parais avoir en ce moment, qu’à la pusillanimité de Polus, qui est tombé précisément dans la même faute qu’il reprochait à Gorgias. Il le blâmait de t’avoir accordé que celui qui professe l’éloquence doive enseigner à ses disciples ce que c’est que la justice ; et je lui reprocherai, à mon tour, de t’accorder qu’il est plus honteux de commettre l’injustice que de la souffrir. Il n’a pas osé réfuter le pur sophisme dont tu te prévaux contre lui, et voilà pourquoi tu triomphes. Tu confonds à dessein ce qui est juste suivant les lois, et ce qui l’est suivant la nature ; Polus est conve-