Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/538

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avec soin le principe sublime et divin qui fait partie de notre être, et nous appliquer, autant qu’il est possible, à nous rendre dignes de l’immortalité. — VIII. Si les vertus intellectuelles, qui ont un principe divin, sont au premier rang, les vertus morales, qui sont purement humaines, doivent être placées au second rang. Aussi le bonheur propre à la vie contemplative a-t-il moins besoin des biens extérieurs, que celui qui résulte de l’exercice des vertus morales. Dans celles-ci, il faut que les actes manifestent l’intention ou la volohté, ce qui n’est pas nécessaire dans la vie contemplative. Voilà pourquoi nous ne pouvons attribuer aux dieux les vertus morales, ni imaginer quels seraient en eux les actes de pareilles vertus, sans tomber dans des fictions absurdes ou ridicules. L’homme est donc une nature intermédiaire entre les dieux, qui ont l’activité contemplative dans toute sa pureté et dans toute sa plénitude, et entre les animaux, qui sont entièrement privés d’une pareille activité. Si les dieux prennent quelque soin des choses humaines, comme on doit le croire, sans doute ils voient avec faveur et ils récompenseront les hommes qui savent apprécier et qui s’appliquent à cultiver le principe qui leur est commun avec la nature divine. — IX. Il ne suffit pas de savoir ce que c’est que la vertu, il faut la pratiquer. Il y a des hommes qui naissent avec d’heureuses dispositions pour la vertu ; mais chez le plus grand nombre, elle peut être l’effet de l’instruction et des bonnes habitudes. Une surveillance commune, un bon système d’éducation publique, sont les moyens les plus propres à préparer la jeunesse aux habitudes vertueuses. Car l’autorité paternelle n’a pas communément la force nécessaire pour cela ; il n’y a que la loi, qui n’excite aucun sentiment de haine en prescrivant ce qui est honnête et sage. La science de la législation est donc une de celles qu’il est le plus important de cultiver. Les sophistes, qui promettaient de l’enseigner, ont montré qu’ils n’en avaient aucune véritable notion. Ceux qui jusqu’à présent ont traité de la morale, ont entièrement négligé ce qui a rapport à la législation. Il convient donc de s’en occuper, si l’on veut perfectionner, autant qu’il est possible, la philosophie de l’humanité.