Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/567

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la vie contemplative seule semble pouvoir nous charmer par elle-même, puisqu’elle n’a point d’autre résultat que la contemplation, tandis que, dans la vie active, il y a toujours, outre l’action, quelque produit dont on est plus ou moins obligé de s’occuper.

Il semble aussi que le bonheur consiste dans le loisir ; car nous ne travaillons que pour nous procurer du loisir, et nous faisons la guerre pour obtenir là paix. Aussi est-ce dans les travaux de la guerre et de l’administration que se manifeste l’activité des vertus pratiques ; et les actions de cette espèce ne laissent aucun moment de loisir, surtout les actions militaires. Car il n’y a personne qui veuille se préparer à la guerre, et la faire uniquement pour le plaisir de la faire ; ce serait une horrible scélératesse que de semer la haine et la discorde entre des amis, afin de susciter entre eux des combats et des meurtres. Mais le bonheur de l’homme chargé de la conduite des affaires publiques lui laisse bien peu de loisirs, et, outre les soins de l’adininistration, il est sans cesse occupé à acquérir de la puissance et des honneurs, ou à se procurer à lui-même et à ses concitoyens un bonheur tout différent de celui que donne la vie purement contemplative[1], et que nous cherchons :

  1. J’ai adopté ici la leçon que donnent les scholies d’Eustratius, citées par Mr Zell, et qui me semble bien plus conforme à la suite des idées de l’auteur, dans tout ce chapitre, que la leçon des éditions ordinaires. Voyez les Remarques de Mr Coray, p. 334 de l’édition grecque de ce traité.