Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/176

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est aussi chose agréable, car on a l’idée, dans ce cas, que l’on est un homme de bien, et c’est ce que désirent tous ceux qui se sentent aimés ; or, être aimé, c’est être recherché pour soi-même.

XVIII. Être admiré est aussi une chose agréable, à cause de l’honneur même attaché à cette admiration. La flatterie et le flatteur de même. Car le flatteur est, en apparence, un admirateur et un ami.

XIX. Faire souvent les mêmes choses est encore une chose agréable, car nous avons vu[1] que ce qui nous est habituel est agréable.

XX. Le changement est agréable aussi ; car le changement est inhérent à la nature, et ce qui est toujours la même chose donne à toute situation établie un caractère excessif. De là ce mot :

Le changement plaît en toute chose[2].
C’est pour cela aussi que ce qui a lieu par intervalles est agréable, qu’il s’agisse des hommes ou des choses. En effet, c’est un changement par rapport au moment actuel, et en même temps, une chose est rare lorsqu’elle a lieu par intervalles.

XXI. Apprendre, s’étonner[3], ce sont aussi, le plus souvent, des choses agréables ; car, dans le fait de s’étonner il y a le désir d’apprendre, de sorte que ce qui cause l’étonnement cause un désir, et, dans le fait d’apprendre, il y a celui de nous constituer dans notre état naturel.

XXII. Procurer des avantages et en recevoir, ce sont encore des choses agréables ; en effet, recevoir des

  1. Au paragraphe 3.
  2. Euripide, Oreste, v. 234. Cp. Morale à Nicomaque, liv. VII, à la fin où cette citation est reproduite.
  3. La plupart des traducteurs ont rendu θαυμάζειν par « admirer » ; mais ce mot est, ici, d’une application moins générale.