Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/203

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les faire condamner, et que préférable est ce risque, qui dépend des juges, car l’on a confiance en eux, mais non pas dans l’adversaire.

XXIX. Pour ne pas accepter le serment, on allègue que ce serait un serment prêté dans un intérêt pécuniaire et que, si l’on était improbe, on pourrait combattre l’adversaire par un serment ; que, en effet, il vaut mieux être improbe en vue d’un profit que pour rien ; que, par le serment prêté, nous aurons (gain de cause) et qu’en ne jurant pas ce serait le contraire ; et qu’ainsi le refus de recourir au serment pourrait s’expliquer par un motif honnête, mais non pas par la possibilité d’un parjure. Et ici se place à propos cette parole de Xénophane, que la provocation d’un impie, adressée à un homme pieux, rend la partie inégale, mais que c’est un cas semblable à celui où un homme robuste provoquerait un homme faible à une lutte entraînant des coups et des blessures.

XXX. Si l’on accepte le serment, on allègue que l’on croit à sa propre bonne foi, mais non à celle de l’adversaire ; et, retournant le mot de Xénophane, c’est le cas de dire que la partie est égale, si l’impie défère le serment et que l’homme pieux le prête ; qu’il serait inouï que soi-même on ne voulût pas jurer dans une affaire pour laquelle on prétend qu’il soit prêté serment par ceux qui sont appelés à la juger.

XXXI. Si on défère le serment, c’est faire acte de piété. dira-t-on, que de se commettre aux dieux ; l’adversaire ne doit pas demander d’autres juges, puisque c’est à lui-même que l’on défère le jugement ; il serait absurde qu’il ne voulût pas jurer au sujet d’une affaire pour laquelle il prétend que d’autres doivent jurer.

XXXII. Comme on voit clairement de quelle façon