§ 13. Si donc tout corps perceptible à nos sens[1] doit avoir ou la faculté d’agir, ou la faculté de souffrir, ou toutes les deux à la fois, il est impossible qu’un corps infini soit perceptible à nos sens. § 14. Mais tous les corps qui sont dans un lieu nous sont perceptibles[2]. Il n’y a donc pas de corps infini en dehors du ciel. Ceci même n’est pas vrai seulement avec cette restriction[3] ; il faut dire, absolument parlant, qu’il n’y a point de corps en dehors du ciel ; car en admettant même qu’il fût simplement concevable et intelligible[4], il serait encore[5] dans un lieu, puisque les expressions Dehors et Dedans[6] expriment un lieu. Ce corps sera donc sensible ; mais il n’y a pas
- ↑ La conclusion régulière, ainsi que le remarque Simplicius, devrait être : « qu’un corps perceptible à nos sens soit infini. » Mais il est vrai qu’une des deux propositions peut se convertir en l’autre.
- ↑ Ou peuvent nous l’être.
- ↑ Ce n’est pas là le sens que donnent Simplicius et Alexandre d’Aphrodisée, dont Simplicius cite le témoignage ; ils comprennent tous deux que les expressions du texte signifient qu’il n’y a pas plus de corps fini en dehors du Ciel qu’il n’y a de corps infini. Après un examen attentif, je me suis décidé pour le sens que je propose, et qui, d’ailleurs, n’est pas en contradiction avec l’autre.
- ↑ Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
- ↑ Le texte n’est pas du tout aussi précis ; et j’ai dû, en quelque sorte, le paraphraser pour qu’il fût plus clair.
- ↑ Plus haut, il est dit qu’il n’y à pas de corps infini en dehors du Ciel. Mais il semble que l’argument n’est pas très-bon ; car, dans la Physique, livre IV, ch ; 2, § 4, t. II, p. 142 de ma traduction, Aristote lui-même reconnaît que les êtres mathématiques n’ont qu’une
Mais il y a, Dans l’expression du texte, une nuance qui peut lever cette apparente contradiction. L’infini ne peut jamais avoir accompli et terminé son mouvement ; on ne peut donc pas dire qu’il a été mis en mouvement, mais simplement qu’il est en mouvement ; si en effet, l’infini peut avoir un mouvement quelconque. Il sera démontré un peu plus bas, § 15, que l’infini ne peut pas se mouvoir.